- MARIE-LOUISE
- MARIE-LOUISEMARIE-LOUISE (1791-1847) impératrice des FrançaisQuand, au début de 1810, Napoléon décide de convoler avec une archiduchesse autrichienne, c’est uniquement pour s’assurer une postérité légitime que Joséphine ne pouvait lui donner; il ne s’en cache guère et déclare, avec un cynisme assez atroce: «J’épouse un ventre.» Mais, quand Marie-Louise arrive en France et que Napoléon vient courtoisement à sa rencontre, il la trouve assez à son goût pour passer aussitôt la nuit à Compiègne avec elle, sans attendre la cérémonie nuptiale. Sortant le lendemain, à midi, de la chambre... matrimoniale, il déclare à tout un chacun: «Épousez une Allemande, mon cher. Ce sont les meilleures femmes du monde, bonnes, naïves et fraîches comme des roses.» La majesté impériale a fait place à l’empressement d’un lieutenant d’artillerie. Et le maître de l’Europe ne se départira plus de sa tendresse pour la gentille épouse qu’il appelle, le plus bourgeoisement du monde, «ma bonne Louise».Mais elle? Petite-nièce de Marie-Antoinette, que pense-t-elle de la France? Fille de l’empereur François II d’Allemagne (devenu François Ier d’Autriche), que pense-t-elle de cet ogre corse (qui a juste l’âge de son père) auquel elle est livrée en rançon d’un duel de treize ans jalonné de ces affreuses catastrophes qui s’appellent Rivoli, Marengo, Austerlitz, Wagram? On doit bien constater que l’Iphigénie habsbourgeoise n’a pas même tenté de simuler un sanglot. D’abord, elle a été moralement fort bien élevée: une archiduchesse est dressée à faire son devoir, quel qu’il soit, au service de son impériale famille. Ensuite, elle a été intellectuellement sous-éduquée (elle est de première force au billard, mais fort ignare en tout autre exercice) et elle n’est pas des plus douées pour la pensée: à un certain bas niveau de réflexion, les préjugés eux-mêmes, même les préventions les plus hostiles, ne trouvent point de racine. Indolente, gentille, très soucieuse de sa petite santé, très occupée de sa petite personne, cette fille de dix-huit ans ne s’amusait guère en famille: or — c’est l’imprévisible — elle s’amuse avec Napoléon. Surtout, elle découvre son aptitude au plaisir, son avidité sensuelle. Sans effort, au grand scandale (qui ne peut s’avouer) de la cour de Vienne, elle devient une épouse modèle, sans aucune arrière-pensée familiale ou nationale.Viennent les années sombres. Mère du roi de Rome, régente pendant les absences de l’Empereur, elle fait de son mieux, docile aux avis de Cambacérès que son époux lui a donné pour mentor. De toute sa molle bonne volonté, elle tient bravement le rôle qu’on lui assigne. En approchant de Paris, Metternich et son empereur s’inquiètent: cette petite fille trop malléable représente un atout important dans leur jeu. Leur conduite est vite arrêtée: d’abord, l’empêcher à tout prix de rejoindre Napoléon; ensuite, ne rien lui expliquer, laisser son peu de réflexion divaguer sur les données les plus imprécises; puis faire appel, dans la vacuité mentale où on la maintient, à son ancien réflexe de sens du devoir familial; enfin l’amuser d’autre chose — ou de quelqu’un d’autre.Mi-général, mi-diplomate, mi-policier, borgne mais habile auprès des dames, Neipperg est choisi par Metternich pour être attaché à l’impératrice des Français, qui bientôt ne sera plus que grande-duchesse de Parme. Napoléon présent, elle était la plus fidèle des épouses; Napoléon absent (et elle n’aura jamais l’audace terrifiante d’imaginer seulement qu’elle pourrait exiger d’aller le rejoindre), elle ne peut se passer d’un homme dans son lit. Neipperg est là; elle est pour lui une compagne modèle, elle lui donne beaucoup d’enfants, elle l’épouse dès qu’elle apprend la mort de l’Autre. Veuve de Neipperg (elle n’a pas quarante ans), elle épouse son chambellan Bombelles, ancien émigré, et est une excellente femme pour lui. Quant au fils de son premier mariage, le duc de Reichstadt (en qui elle n’aurait jamais imaginé de voir Napoléon II), elle aurait été une mère affectueuse pour lui si Metternich n’avait pris soin de la tenir à bonne distance de son autre otage. Elle était sincèrement persuadée, depuis Parme, qu’il était très heureux à Vienne et elle a eu un vrai chagrin de sa mort.• 1963; prénom♦ Moulure fixée sur le bord intérieur d'un cadre, d'un sous-verre. Des maries-louises toilées.I.⇒MARIE-LOUISE1, subst. masc.HIST. MILIT. Jeune recrue de 1814, appelée à servir par anticipation. Pour défendre son sol envahi, la France épuisée donne ses derniers enfants, de pauvres paysans très jeunes (...). On les appelait des Marie-Louises (A. FRANCE, Vie littér., t. 2, 1890, p. 182). Ainsi que Napoléon les «Marie-Louise» de la campagne de France, elle [la société] les dévore [les imbéciles] (BERNANOS, Gds cimet., 1938, p. 4).— P. anal. Jeune recrue de 1914-1915. «...Les Marie-Louise, les jeunes de la classe 15...», [Jean Marcel, Sur le front d'Arras], Le Journal du 21 juin 1915 (SAIN. Tranchées 1915, p. 50).Prononc. et Orth.: [
]. Avec majuscule. Plur. des Marie-Louise ou des Marie-Louises (supra). Étymol. et Hist. 1890 «surnom donné aux conscrits français de 1814» (FRANCE, loc. cit.); 2. 1915, janv. «surnom donné aux conscrits de 1915» (L'Intermédiaire [des Chercheurs et Curieux] ds SAIN. Tranchées, p. 151). 1 du nom de l'impératrice Marie-Louise, qui en 1813 alors qu'elle était régente fit lever par anticipation les conscrits des classes 1814 et 1815 qui luttèrent héroïquement contre les Alliés. 2 emploi p. ext. de 1, ces conscrits de 1915 ayant été eux aussi appelés par anticipation.
II.⇒MARIE-LOUISE2, subst. fém.ARTS DÉCORATIFS. Bordure servant à mettre en valeur une oeuvre encadrée, une affiche. Pour réveiller les splendeurs anciennes de ces toiles (...) on a imaginé de les encadrer de ce blanc que Van Gogh aimait (...). Les tons ayant baissé, tant de blanc ne s'imposait pas: une simple «marie-louise» de quelques centimètres eût suffi (LHOTE, Peint. d'abord, 1942, p.136).Prononc. et Orth.: []. Plur. des maries-louises (Lar. Lang. fr.). Étymol. et Hist. 1. 1942 (LHOTE, loc. cit.); 2. 1963 «passe-partout fixé sur le bord intérieur d'un cadre» (Lar. encyclop.). Emploi comme nom commun du prénom Marie-Louise pour désigner de nombreux noms d'instruments ou d'accessoires ayant été formés à l'aide d'anthroponymes; cf. davier, guillaume.
1. marie-louise [maʀilwiz] n. f.ÉTYM. XXe; prénom.❖♦ Passe-partout fixé sur le bord intérieur d'un cadre. || Marie-louise biseautée, à gorge. || Des maries-louises.♦ Encadrement constitué par une bordure en harmonie avec la couleur dominante d'une image (affiche, etc.).————————2. marie-louise [maʀilwiz] n. m.ÉTYM. XIXe; de Marie-Louise de Habsbourg-Lorraine; nom donné par métonymie aux conscrits de 1814.❖♦ Surtout au plur. (des Marie-Louise ou des Marie-Louises). Homme inexpert. ⇒ Bleu, conscrit, novice. || « M. Chaix (…) voulait-il défendre les “marie-louise” de la police lyonnaise à qui la presse locale reproche d'accumuler les échecs ? » (l'Express, 12 déc. 1977, p. 178).
Encyclopédie Universelle. 2012.